Pour TOUTES les femmes et les filles : Pritha Chatterjee veut « un monde sans violence »

« La violence et la discrimination apparaissent très tôt dans la vie des filles, d’abord au sein de la famille, puis à l’école où les filles passent jusqu’à six heures par jour », explique Mme Chatterjee, qui s’est entretenue avec ONU Femmes lors de la Conférence ministérielle Asie-Pacifique, au cours de laquelle les dirigeants régionaux ont examiné les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing.

« L’égalité des sexes et la qualité de l’éducation sont inextricablement liées, ajoute Pritha Chatterjee. En travaillant avec les jeunes et les adolescents, nous voulons opérer un changement générationnel par rapport aux normes discriminatoires. »

Breakthrough plaide en faveur de la création d’un « système éducatif transformateur en matière de genre », une approche globale de l’école consistant à travailler avec les élèves, le corps enseignant, l’administration scolaire et les décideurs politiques.

« Dans un tel système, tout le monde serait en sécurité, les garçons ne seraient pas favorisés par rapport aux filles et ces dernières ne seraient pas contraintes d’abandonner l’école pour travailler à la maison », explique Pritha Chatterjee.

Pritha Chatterjee pense que de tels systèmes éducatifs peuvent à terme modifier les normes sociales, faire reculer la violence fondée sur le genre et promouvoir le leadership des femmes.

Breakthrough est l’un des chefs de file de la Coalition d’action Génération Égalité et a bénéficié d’une subvention du Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes, géré par ONU Femmes. En 1996, la résolution 50/166 de l’Assemblée générale des Nations Unies a appelé à la création du Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies en réponse aux engagements pris dans la Déclaration et le Programme d’action de Beijing. D’ici 2028, Breakthrough vise à atteindre 4 millions d’adolescent.e.s dans 35 000 écoles en Inde.

Pritha Chatterjee ajoute : « Une autre action critique qui a eu un impact sur la lutte contre la violence envers les femmes et les filles est l’utilisation de la culture pop et du storytelling pour faire changer les normes et le discours liés au genre ». Breakthrough s’efforce également de sensibiliser les créateur.rice.s de contenu numérique et les jeunes défenseur.se.s de la cause à la création d’un « internet féministe ».

L’égalité des sexes est un objectif commun, et tout le monde a un rôle à jouer. Pritha Chatterjee raconte une histoire pour montrer en quoi l’autonomisation des jeunes peut faire une différence tangible dans les communautés locales.

« Anchal a rejoint l’intervention scolaire de Breakthrough en faveur des adolescent.e.s et elle est devenue une leader de la jeunesse, explique Pritha Chatterjee. Elle a appris à dénoncer le harcèlement sexuel dans les espaces publics, un sujet tabou pour de nombreuses adolescentes et jeunes femmes. Sa sœur aînée n’avait jamais signalé les incidents dont elle avait été victime ou témoin, craignant que cela ne perturbe son éducation ou, pire, qu’elle soit tenue responsable des faits. »

« La première fois qu’Anchal a évoqué ce problème avec ses parents, ces derniers ont réagi avec incrédulité et lui ont rétorqué : « Ta sœur aînée n’a jamais été confrontée à de tels incidents… pourquoi es-tu visée ? »

« Dotée des compétences et des connaissances acquises grâce au programme de Breakthrough, Anchal a su qu’elle devait faire quelque chose. Avec son groupe scolaire, Anchal a contacté les fonctionnaires locaux et elle a réussi à les convaincre d’installer de l’éclairage et des caméras de vidéosurveillance aux endroits considérés comme dangereux par les femmes et les filles. »

En conséquence, les incidents de harcèlement ont diminué et les filles de sa communauté sont désormais plus confiantes dans leur capacité à dénoncer la violence.

Le Programme d’action de Beijing a reconnu le pouvoir des mouvements féministes et de la société civile dans l’élaboration des politiques et le soutien aux survivantes. La recherche confirme que la présence d’un mouvement féministe fort et autonome est le facteur le plus important pour faire progresser la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles. Et pourtant, en 2022, les pays ont consacré moins de 1% pour cent de l’aide au développement à la lutte contre la violence basée sur le genre et seule une petite part de cette aide est parvenue aux organisations de femmes.

Pour Pritha Chatterjee, les questions que le Programme d’action de Beijing s’est engagé à résoudre sont aussi pertinentes aujourd’hui qu’en 1995. 

Le rôle de la société civile et des organisations féministes est important, dit-elle, pour « élaborer des mécanismes de responsabilité, amplifier et créer des messages stratégiques pour les différentes parties prenantes afin de faire avancer la cause du développement équitable pour les deux sexes, et de plaider pour des politiques féministes et des approches transformatrices en matière de genre auprès du gouvernement et des décideurs. »

« La diminution du financement des réseaux féministes et des organisations de défense des droits des femmes complique l’organisation de réunions en présentiel et la participation aux processus régionaux et mondiaux », ajoute-t-elle.

La vision de Pritha Chatterjee pour toutes les femmes et les filles est puissante : « Bâtissons un monde sans violence, où elles pourront réaliser leur plein potentiel et ne devront pas lutter pour simplement y trouver une petite place. »